Le dur apprentissage européen de Mme Dati

Publié le par Hughes Beaudouin

« C’est une météorite. Elle s’est marginalisée d’elle-même dans le groupe ». Le propos de ce député européen UMP à l’encontre de sa collègue Rachida Dati est sévère. Et rejoint ce que la plupart des autres eurodéputés pensent, sans parfois oser le dire. Ses absences répétées des réunions du groupe UMP, le sentiment qu’elle donne d’être toujours « ailleurs » même quand elle est là, ont marginalisé l’ancienne garde des sceaux. "Elle a son propre agenda et de toute évidence, il n'a pas grand chose à voir avec l'Europe" explique malicieux un de ses collègues UMP. Déjà en juillet, lors de la rentrée solennelle du parlement européen, ses collègues UMP s’étaient amusés du coup de téléphone reçu d’un collaborateur de Rachida Dati leur conseillant « de lui transmettre systématiquement tous les dossiers médiatiques ». On en rit encore dans les couloirs du parlement...
A la Représentation permanente de la France, on s'était ému également que l'ancienne ministre début juillet fasse état de documents internes, obtenus grâce à des contacts personnels.

Mais c’est à la session plénière de septembre que la nouvelle eurodéputée a probablement franchi la ligne jaune, suscitant l’exaspération de nombre de ses collègues, français et européens. Il s’agit alors d’attribuer un rapport sensible sur les hedge funds à un eurodéputé conservateur. Il y a plusieurs candidats, difficiles à départager. Jean-Paul Gauzès, député européen français UMP depuis 2004, ancien banquier et fin connaisseur du dossier, propose alors afin de mettre tout le monde d’accord et d’occuper lui même la fonction. Il s’engage à créer dans la foulée un groupe de travail réunissant tous les députés intéressés. Approbation générale. C’est alors que Rachida Dati se lève, et accuse Jean-Paul Gauzès de se comporter comme un « dictateur autocrate » et elle vote contre. Seule. L’assemblée effarée n’en revient pas. Les eurodéputés allemands se demandent ce qui se passe dans le groupe UMP. Selon un autre député, Rachida Dati menace de faire intervenir l’Elysée. « Là, c’est la gaffe de trop » remarque un député allemand. Quelques minutes après cette séance houleuse, les députés se lâchent : « Il y a ici des dizaines d’anciens ministres, d’anciens premier ministres et même d’ex Chefs d’Etat. On acquiert ici le respect par son travail, pas par ses anciens titres ou le nombre de caméras qui vous suivent ». Astrid Lulling, députée luxembourgeoise est furieuse : « Je n’ai jamais vu ça. Ici on travaille, on fait pas du show pour des émissions people ». Référence aux nombreuses caméras qui suivent régulièrement Rachida Dati dans l’enceinte du Parlement.
Pour sauver la face, Rachida Dati affirme le lendemain qu’elle a obtenue d’être rapporteur sur un autre sujet : le GMES ou pour faire simple les technologies d’observation de la Terre par satellite. Pas tout à fait vrai, elle n’a été chargée en fait que de suivre le dossier pour le groupe des droites européennes. Ce sont deux eurodéputés socialistes, allemand et italien, qui ont en fait été désignés rapporteurs. L’apprentissage du parlementarisme à l’européenne est apparemment plus compliqué que prévu…

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